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  • Samuel Samson

Retour sur la présentation de mon mémoire

C’est mardi dernier que j’ai présenté mon mémoire Tous ensemble pour le Québec de demain, en lien avec la charte des valeurs du Québec. J’aimerais d’abord remercier les nombreuses personnes qui m’ont écrit et communiqué leurs félicitations et/ou leur appui, d’une façon ou d’une autre. C’est vraiment très apprécié et d'autant plus touchant.


Ayant opté pour une présentation orale de mon mémoire avec seulement quelques points de rappels, je crois que la lecture d’un texte résumant les différents éléments de mon mémoire et l’ensemble de mes recommandations m’aurait permis de faire un survol plus complet de ma pensée. En effet, il y a beaucoup d’éléments que j’aurais aimé soulever dans ma présentation et qui sont passés sous le tapis. Enfin, le fait que certains membres de la Commission m’aient questionné visiblement dans une perspective partisane m’a sans doute limité dans ce que j’aurais voulu dire.


Par chance, pour ce qui est des travaux de la Commission, la version écrite de mon mémoire (que vous pouvez télécharger ici) témoigne de ma position de façon claire et complète, en étayant par ailleurs chaque propos par un raisonnement logique. Cependant, pour faire suite aux demandes de certaines personnes qui m’ont invité ou qui m’ont demandé s’il me serait possible de clarifier succinctement ma position, voici un exposé assez concis de ce que je pense et de ce que je propose.


D’abord, suis-je pour ou contre la charte ?


Je crois que comme pour n’importe quel enjeu, tout n’est pas noir ou blanc. Il y a du bon dans la charte, c’est une bonne chose de doter le Québec d’un cadre officiel pour l’intégration des nouveaux arrivants et son développement futur, basé sur des valeurs communes. Par ailleurs, je crois que d’une façon générale, la reconnaissance du fait français au Québec, l’égalité entre les hommes et les femmes et la neutralité religieuse de l’État font plutôt consensus. Mais les valeurs du Québec se résument-elles vraiment à cela ?


Je trouve que la démarche actuelle est un non-sens, car elle ne permet pas, d’une part, d’affirmer l’identité réelle du Québec, culturellement influencée par le christianisme et le catholicisme et d’autre part, elle me semble plutôt discutable sur le plan de l’intégrité et du respect des droits des minorités culturelles. Je serais donc en faveur de l’adoption de la charte si on lui apportait quelques modifications, mais dans sa version actuelle, l’idée ne me sourit pas tellement.


Pourquoi ?


D’abord, j’ai foi que nous ne formons qu’une seule grande famille humaine. Par conséquent, je suis profondément pacifiste et sur la question de la charte, je suis convaincu de l’importance d’un consensus. Par contre, depuis plusieurs années, il y a un malaise palpable chez beaucoup de Québécois face à l’arrivée d’immigrants issus d’autres cultures et ayant parfois d’autres valeurs, ceux-ci craignant pour l’avenir de leur identité. Au-delà des croyances religieuses de chacun et qui relèvent certainement de la sphère privée, les valeurs d’une société sont fortement influencées par sa culture et son héritage religieux qui sont parties intégrantes de son identité. Or, ici, l’Église catholique s’est démarquée par un apport historique exceptionnel, positif sur certains aspects et négatif sur d’autres, mais il n’en demeure pas moins que l’identité québécoise, sur le plan strictement culturel, est profondément marquée par son patrimoine religieux immatériel.


Le catholicisme, que l’on soit croyant ou pas, que l’on y adhère ou pas, fait fondamentalement partie de notre culture et sa non-reconnaissance en tant que tel pourrait, à plus long terme, entraîner certaines répercussions néfastes au niveau identitaire, tout simplement parce qu’à la base, toute culture se développe sur un axe linguistique (pensée) et sur un axe religieux (valeurs, mentalités). Je propose donc de reconnaître cet apport historique et ce patrimoine IMMATÉRIEL, dans une optique, je le répète, strictement culturelle et sans attenter à la neutralité religieuse de l’État (d’ores et déjà affranchi de l’influence de la religion). Je cite en exemple le modèle de laïcité italien, un pays qui tout en étant laïque, reconnaît que « les principes du catholicisme font partie du patrimoine historique du peuple italien. » Une telle mesure, permettrait selon moi d’assurer la pérennité de la « culture populaire du Québec » dont les manifestations culturelles et traditionnelles pourraient autrement être menacées par une laïcité « à la française ». Une laïcité « à la française » pourrait aussi entraîner des impacts négatifs dans certains milieux (et davantage en milieu rural) où les paroisses jouent encore un rôle névralgique dans le milieu communautaire. Une telle mesure symbolique serait par ailleurs absolument essentielle si l’on souhaite réellement préserver l’identité du Québec à plus long terme. Enfin, je crois que la reconnaissance symbolique de l’héritage religieux du Québec permettrait de rassurer bon nombre de Québécois, qui ne se sentant plus « menacés », seraient plus ouverts aux minorités culturelles.


Ensuite, comme je viens de le mentionner, je crois que le Québec se trompe en s’inspirant du modèle français. Si celui-ci comporte certains avantages (tout n’est pas noir ou blanc), il convient de remarquer que partout dans le monde, les modèles de laïcité ou d’affirmation identitaire résultent d’une conjoncture et de l’évolution historique du pays en question. Dans le cas du modèle français, la laïcité a été promulguée il y a plus d’un siècle, alors que le gouvernement républicain anticlérical – pour résumer – craignait l’influence de l’Église qui pendant plus de mille ans, avait maintenu l’ordre public en s’alliant avec la noblesse. Or, au début du dernier siècle, en France, les partis royalistes jouissaient de la faveur populaire et les républicains ont alors voulu se prémunir contre l’influence du clergé qui aurait pu favoriser la restauration monarchique. La laïcité, en France, visait donc à protéger l’État de l’Église. Aux Etats-Unis, le spectre est tout autre, puisque le pays s’étant construit sur la diversité religieuse (le peuplement des différentes minorités religieuses persécutées au fil des guerres de religions en Angleterre et en Europe), la laïcité vise plutôt à protéger ces minorités, donc les Églises de l’État. Au Québec, en 2014, force est de constater que l’État est, dans les faits, laïque et affranchi de la tutelle de l’Église depuis plusieurs décennies. Les objectifs d’une charte des valeurs seraient plutôt de favoriser le vivre-ensemble à travers des valeurs communes, dans le respect des particularités historiques du Québec et des croyances de chacun. Le modèle de laïcité que nous développerons devra donc refléter cette volonté et ce n’est certainement pas le modèle français qui le permettra, lui qui est, comme le démontre l’expérience, un échec tant au niveau de l’intégration des immigrants qu’au niveau du respect de l’identité [historique française] et qui se traduit notamment par une augmentation du racisme et même, par l’émergence d’une nouvelle forme d’intégrisme, l’intégrisme laïque, comme le démontre par exemple le discours de certains politiciens, tant de la gauche que de la droite et qui souhaiteraient, si je me fie à leurs propos, faire de la laïcité la nouvelle religion de la France.


Actuellement, beaucoup craignent l’intégrisme islamique. Si l’intégrisme et l’extrémisme constituent une réalité – négligeable, heureusement – dans toutes les religions et dans tous les mouvements idéologiques, l’intégrisme islamique tel qu’on le connaît aujourd’hui est relativement récent, n’ayant qu’un peu plus d’un siècle d’âge (sur les 14 que compte l’Islam). Cette nouvelle forme d’intégrisme est apparue alors que les Français et les Britanniques ont colonisé le monde arabo-musulman. Cette colonisation et cette exploitation économique de peuples qui pendant près de mille ans avaient dominé le monde des sciences, des mathématiques, de l’innovation technologique et de la philosophie a atteint l’orgueil de ces populations dont les meneurs se sont interrogés sur les raisons de la décadence. La chute du califat (ce qui se rapproche le plus, dans notre culture, de la papauté) après la Première guerre mondiale et la création d’un foyer national juif sur une terre trois fois sainte, contribuèrent à blesser davantage la fierté de certaines élites arabes. En s’interrogeant, celles-ci ont fini par conclure que si les pays musulmans vivaient aujourd’hui des heures sombres, c’était parce qu’ils s’étaient écartés des enseignements de Mahomet et de fait, ils ont aussi conclu que si les peuples musulmans vivaient comme au temps du Coran et selon le mode de vie et les coutumes de l’époque, ils sauraient restaurer l’âge d’or arabe. Bientôt, la découverte d’or noir au Moyen-Orient permettrait de financer ce mouvement naissant. Pour lutter intelligemment et efficacement contre l’islamisme radical, il convient d’en saisir la nature et de le combattre par un plan, idéalement international (puisque le problème n’est pas exclusif au Québec) et qui passe nécessairement par le dialogue interreligieux. Autrement, en appliquant le principe « œil pour œil, dent pour dent », l’on risque plutôt d’envenimer la situation et la haine nourrie de part et d’autre. D’ailleurs, de dire que l’interdiction totale du port des signes religieux permettrait de lutter contre l’intégrisme est une fausseté. L’exemple de la France est encore une fois éloquent à cet égard. Y a-t-il moins d’intégrisme religieux en France avec l’interdiction du port des signes religieux ? Est-ce que les réseaux terroristes islamistes portent la France dans leur cœur grâce à l’interdiction du port des signes religieux ? Poser la question, c’est y répondre.


Me considérant, désormais, d’abord comme un citoyen du monde, je suis en faveur de l’immigration. J’ai foi qu’au fond, nous ne formons tous qu’une grande famille humaine. De plus, l’avenir démographique du Québec étant plutôt incertain, l’immigration apparaît comme une solution permettant de pallier le vieillissement de la population et ce, bien que je pense également que sélectionner les immigrants sur la base de la « proximité culturelle » (sauf pour les réfugiés) et non pas seulement de la connaissance du français, faciliterait leur intégration. Néanmoins, beaucoup, au Québec, ressentent un malaise face à l’arrivée massive de personnes aux coutumes différentes. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je crois que de reconnaître le legs culturel du catholicisme serait un beau compromis pour faciliter l’acceptation et l’intégration des nouveaux arrivants. Quoi qu’il en soit, il est important de comprendre que du moment où des individus sont reçus à l’immigration et éventuellement citoyens canadiens, ils deviennent égaux en droits avec le reste de la population. Ou bien on les accepte, ou bien on ne les accepte pas – le Québec sélectionne lui-même ses nouveaux arrivants selon ses propres critères - mais l’on doit être conséquent. Il s’agit de la raison pour laquelle je suis plutôt contre l’interdiction du port des signes religieux, quoiqu’encore là, il faut y aller avec discernement. Par exemple, la circulation à visage découvert est une question de sécurité publique.


Pour nous qui sommes issus d’une culture religieuse où il y a peu de signes ostentatoires et qui dans l’ensemble, formons une société peu religieuse, cela peut être difficile à comprendre, mais pour des gens qui sont convaincus, à tort ou à raison, de la valeur de leurs signes religieux, ceux-ci ne peuvent être retirés ou remis comme de simples vêtements ou accessoires : pour eux, il s’agit de l’expression de leur foi, ce qui peut être la chose la plus précieuse, quelque chose qui dépasse l’entendement et qui par conséquent, l’interdiction des signes religieux peut porter atteinte à la liberté religieuse. Je le répète, nous avons le choix d’accepter ou de refuser les immigrants, mais du moment où nous les acceptons, il faut leur reconnaître les mêmes droits fondamentaux qu’à nous. De toute façon, en affirmant la laïcité, le gouvernement évite toute confusion quant à sa neutralité religieuse. Certains argueront que les croyances religieuses de certains fonctionnaires pourraient influencer la qualité de leur travail et les amener à refuser de mettre en application certaines décisions gouvernementales. Certes, c’est ce qu’on appelle un cas de conscience et cela pourrait éventuellement être le cas de n’importe quel fonctionnaire dans une situation donnée ; l’on a qu’à prendre l’exemple du dossier de l’euthanasie pour s’en convaincre et dans tous les cas, je ne vois pas comment le fait de ne pas porter de signes religieux y changerait quoi que ce soit…


Pour ce qui est de l’égalité entre les femmes et les hommes, pour moi, cela ne représente pas une valeur, mais bien un fondement social absolument non-négociable. Pour ce qui est du français, je suis certainement pour sa reconnaissance en tant que langue commune du Québec, mais je crois qu’en termes de mesures concrètes, le Gouvernement devrait plutôt opter pour une nouvelle approche – sans modifier la législation actuelle - amenant les Québécois à aimer sincèrement le français (par un meilleur enseignement notamment), une langue riche et à ainsi le renforcer (au lieu de le réduire à une langue faible et menacée, ce qui le rend peu séduisant), plutôt que de limiter l’expression ou l’apprentissage d’autres langues.


En fin de compte, j’émets 45 recommandations écrites en ayant foi que si l’identité réelle du Québec, notamment l’héritage catholique est assumé, ce sera plus facile d’accepter les autres tels qu’ils sont, car la majorité ne se sentira plus menacée et les valeurs de la société d’accueil seront plus facilement perceptibles pour les nouveaux arrivants.


Pour comprendre comment j’en arrive à de telles conclusions et à de tels constats, je vous invite à consulter ou à télécharger mon mémoire en cliquant ici, vous y verrez méthodiquement le fruit de mon raisonnement.


Vous pouvez également visionner mon audition à la Commission des institutions sur le site de l'Assemblée nationale en cliquant ici.

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