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Samuel Samson

Aux temps jadis

Après le long, vigoureux et presque interminable hiver que l’Amérique du Nord vient de vivre, nous sommes bien placés pour reconnaître que les conditions climatiques sont bien souvent un déterminant à l’origine de bien des petits soucis quotidiens et occasionnent fréquemment des désagréments de plus ou moins grande ampleur. Dans ce contexte, il peut être intéressant d'interroger notre passé à ce propos, plus par curiosité que par réelle utilité, quoiqu'en l'histoire - puisqu'elle raconte l'aboutissement du présent et qu'elle est souvent portée à se répéter - peut également résider une source intarissable de réponses à nos questionnements et à nos questions les plus légitimes sur l'avenir, d'autant plus dans un contexte de bouleversements climatiques.


Pendant la majeure partie de l’histoire connue de l’humanité, l’activité économique aura essentiellement résidé sur une économie primaire, régulée par le cycle des saisons, par les conditions climatiques. Toute dérogation météorologique, même minime – par exemple l’occurrence de températures plus fraîches ou plus chaudes, plus ou moins de précipitations à certaines périodes spécifiques et charnières, etc. – pouvait alors se traduire par des catastrophes naturelles, des famines et le développement d’épidémies meurtrières. En Occident, la première révolution industrielle, au XIXe siècle, puis l’industrialisation de l’Europe et de l’Amérique tout au long des XIXe et XXe siècle, auront progressivement entraîné un transfert massif des populations rurales vers les grands centres urbains. Mais sommes-nous réellement immunisés contre les aléas de la nature ?


Si aujourd’hui, environ 80 % des habitants des pays de l’OCDE et un peu plus de la moitié de la planète vivent en ville, il n’en demeure pas moins qu’en 1997, la valeur des services rendus par les écosystèmes à l’économie mondiale – industrialisée, mondialisée et alors évaluée à 18 000 milliards de dollars - se chiffraient à 33 000 milliards de dollars. Le calcul peut paraître grossier, mais cela revient à dire, éventuellement, que le niveau de dépendance de l’économie envers la nature, serait d’au moins 183,3 %. Or, l’état de la nature – au sens propre – dépend directement des conditions climatiques et météorologiques, qui on sans doute, peuvent être influencées à grande échelle par les activités humaines.


L’on pourrait longuement discourir sur les enjeux de changements climatiques et d’économie, mais cela manquerait au but du présent exercice. Néanmoins, les données et exemples précités n’en demeurent pas moins éloquents en ce qui a trait en ce qui a trait à l’influence que peut avoir la météo sur le monde.


Considérant que l’histoire n’est souvent qu’une enfilade de conjonctures particulières qui en entraînent de nouvelles, que nous révèle notre passé à ce propos ?


En fait, la plupart des grands événements de l’histoire auront eu lieu directement suite à une situation climatique particulière. Par exemple, la diminution du rendement agricole, les famines et autres catastrophes naturelles causées par des anomalies environnementales et ayant des répercussions en chaîne, affectant ainsi les autres secteurs de l’économie, les uns après les autres et favorisant souvent l’apparition d’épidémies qui auront de tout temps fragilisé des populations à la recherche de boucs-émissaires et résolvant souvent cette quête par la prise d’armes contre leurs voisins. Ces évènements historiques en entraînant souvent d’autres, la météo finit par étendre ses tentacules un peu partout. C’est d’autant plus vrai à grande échelle. Ainsi, à compter du Xe siècle, l’hémisphère nord bénéficie d’un climat plus clément causé par l’optimum climatique médiéval, un léger réchauffement climatique cyclique et naturel, s’étant traduit par peu d’aléas nuisibles. Les Vikings qui coloniseront ponctuellement le nord de la côte est nord-américaine, s’établiront d’abord au Groenland, puis décriront le territoire actuel de Terre-Neuve comme étant doux et tempéré ; comme étant non seulement le paradis du saumon, mais également de la vigne ! Dès 1250, cependant, la planète amorça un petit âge glaciaire. À compter de l’an 1300, les hivers européens devinrent froids et rigoureux et les récoltes déclinèrent, au même rythme d’ailleurs que l’économie féodal de l’époque. En 1337 débute la guerre de Cent ans, 25 ans après la dissolution de l’ordre du Temple dont on souhaitait s’accaparer les richesses et à partir de 1347, c’est la peste noire qui sévit en Europe après avoir décimé l’Asie. Le paroxysme est atteint entre 1570 et 1730, où de nombreux européens prendront la route des Amériques et alors qu’en France seulement, plus de 2 000 000 de personnes mourront lors des seuls hivers de 1693 et 1694 (sur une population d’environ 22 000 000 sujets). En 1816, le Canada ne connaîtrait pas d’été, alors que l’hiver se prolongera jusqu’en juin et les premières gelées auraient lieu dès le mois d’août, occasionnant encore une fois d’importantes famines et ayant des répercussions directes et indirectes allant jusqu’à la proclamation de l’Amérique du Nord britannique en 1867. La précarité des populations et la situation socio-économique de l’époque inspireraient les Lumières, alimenteraient les styles littéraires et insuffleraient un esprit de révolte à bien des peuples, donnant naissance à un âge de révolutions, du XVIIe au XIXe siècle et forgeant le caractère du monde tel qu’on le connaît aujourd’hui. Cette période révolutionnaire et les nouveaux paradigmes inhérents favoriseront l’émergence de la Révolution industrielle, qui à son tour, permettrait l’industrialisation de l’Occident et dans une certaine mesure, une nouvelle époque coloniale. L’on pourrait poursuivre ainsi les liens d’enchaînement jusqu’à aujourd’hui.


En fin de compte, les conditions climatiques et météorologiques ont de tout temps influencé le développement de la planète et de l’humanité et ce, bien au-delà de la façon dont elles peuvent influencer nos humeurs et de notre santé psychologique, qui sont en soi deux éléments non-négligeables, ayant des répercussions décisives se mesurant à la fois à court, à moyen et à long-terme dans la vie d’un individu et éventuellement, d’un groupe de personnes. En fait, ces répercussions se mesurent que ce soit de façon directe, en favorisant ou en défavorisant l’implantation d’établissements et d’activités humaines sur le plan géographique, de façon plus ou moins directe, en constituant un déterminant fondamental à l’occurrence d’un événement ou d’une conjoncture historique, ou de façon indirecte, en tant qu’ingrédient indissociable - parmi d’autres -composant la chaîne de conjonctures et d’évènements interreliés que constitue l’histoire, garante de notre présente et à travers laquelle se trouvent bien des réponses et des référents sur l’impact de nos actions d’aujourd’hui sur le monde de demain. Par conséquent, considérant, d’une part, cet impact des conditions climatiques et météorologiques sur le cours de l’humanité et d’autre part, les perspectives en ce domaine que semblent nous promettre les changements climatiques auxquels nous sommes confrontés à ce jour, de même que l’impact certain, à un degré ou un autre des activités et de la pensée humaines sur l’environnement, que pourra bien nous réserver l’avenir ?

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